Je n’ai rien posté ou presque à propos de Hawaï. Juste deux ou trois photos sur Facebook, une sur Instagram et à peine plus à ma famille ou certains amis sur Whatsapp.
Peut être ai-je déjà tout dit dans ma Chronique Louisianaise, peut être qu’ O’ahu ne se prête pas au format carré que je souhaite généralement pour ce blog ?
Ou est-ce un peu de culpabilité de faire un si beau voyage en pleine pandémie ?
Je n’ai pas seulement mis en place la location de vélos sur le site de la boite, j’ai aussi pris en main le blog de Flambeaux et tente d’imposer ma prose dans la langue de Shakespeare. Je fais relire à Eric qui corrige les quelques fautes ou grosses erreurs de syntaxe, mais il me laisse sinon donner libre cours à ma créativité et c’est un plaisir de réussir à faire cet exercice aussi en anglais!
J’ai donc écrit :
Un post de présentation à la 3ème personne qui romance UN TOUT PETIT PEU notre départ à la nouvelle Orléans
J’ai eu quelques retours plutôt positifs à propos de ce que j’écris ici, sur le blog de Flambeaux ou via ma Chronique Louisianaise, et l’idée fait son chemin d’essayer de faire quelque chose de ce plaisir que j’ai d’écrire. Ici tout le monde a son métier et un ou plusieurs « side gig ». Je n’ai pas encore le job principal de mes rêves mais je me dis parfois que mon « talent » pour chroniquer pourrait peut être trouver sa place quelque part et toucher un lectorat différent ou plus large que simplement mon entourage.
En dehors de l’expérience avec Lyon69/CityCrunch en 2010-2011, j’écris depuis plus de 10 ans essentiellement pour un public confidentiel et j’ai aussi tout un paquet de notes jamais publiées sur mon ordi. Mon premier moteur et ma principale satisfaction sont avant tout personnelles*, je sais ce que j’écris, pourquoi, avec quelles références,… et il est donc plus facile de garder ça pour moi plutôt que prendre le risque d’être incompris. Partager ce blog à un lectorat plus étendu ou écrire sur le site de Flambeaux sont de bons exercices de vulnérabilité et le risque d’être exposé à la critique, mais ce n’est pas si désagréable alors je suis tenté de continuer!
« I’ll be right with you, baby » m’a dit mardi matin la caissière du Whole Foods en me faisant signe de quitter ma file d’attente et de rejoindre la caisse qu’elle était en train d’ouvrir. Je ne sais pas si c’était la première fois qu’on m’appelait ainsi mais ça m’a fait sourire en y repensant ensuite dans la voiture, sur le chemin du retour.
Au boulot, Eric utilise aussi « baby » ou « sweetheart » à tout va. Il le fait surtout avec les clientes afro-américaines, mais c’est tellement un tic de langage que cela lui échappe aussi parfois avec des interlocuteurs masculins. On s’était fait la remarque avec Barrett, qu’aussi typique du sud que cela soit, ce type d’expression peut aussi être perçu comme particulièrement sexiste ou condescendant.
L’après-midi même, patientant avec un café dans la salle d’attente sur-climatisée du concessionnaire Nissan chez qui je suis allé faire la révision des 90 000 miles, j’entends la secrétaire envoyer elle aussi du « baby » ici et là. Mon tour venu, j’y ai aussi eu droit et ai de nouveau eu le sourire. N’est-ce finalement pas juste affectueux ? Est-ce que d’ici quelques temps je ponctuerai moi aussi mes phrases ainsi ?
J’y fais maintenant attention tout le temps, je guette ces expressions qui rythment les conversations, et plus spécifiquement chez Eric, dont l’accent, les intonations et les expressions interrogent souvent les visiteurs au point qu’on lui demande régulièrement d’où vient son parler. A force de l’écouter j’ai constaté qu’il emploie aussi « man » quelque soit le genre de la personne à qui il s’adresse, et qu’il a le sens de l’hyperbole. Il ne se passe pas un seul jour sans que je sois « bro » (frère), « a godsent » (un envoyé du ciel), « an asset to the company » (un atout pour l’entreprise) ou « a beautiful dude » (une belle personne). De là à ce qu’il m’appelle un jour « baby », je ne serai même pas surpris!
La soirée était si bonne Dimanche que j’y suis retourné Mardi. A ceux qui auraient pu penser qu’un groupe constitué essentiellement de trompettiste n’a pas de sens, Trumpet Mafia répond « chiche! ».
Chaque fois que je suis passé devant le Royal Frenchmen Hotel à vélo, j’ai eu envie de m’y arrêter.
La rue est à sens unique et en arrivant depuis Washington Square on aperçoit deux étages de galeries donnant sur une cour intérieure dont la clameur se fait de plus en plus distincte à mesure que l’on s’approche.
Une fois devant, un mur empêche de voir ce qu’il se passe à l’intérieur, mais les guirlandes lumineuses et le haut des parasols qui dépassent laissent deviner une agréable terrasse. Le public tassé dans les étages ondule au rythme de la musique, un verre à la main, et si la file d’attente n’est pas trop dense, on tente de deviner à travers l’étroit portail en fer forgé de quels instruments le groupe est formé.
Dimanche après-midi, Baptiste m’a rejoint après le boulot, et au lieu d’aller dans l’un des bars du Quarter que l’on connaît, on est allés jusqu’au quartier voisin du Marigny garer nos vélos sur Frenchmen Street. Si Bourbon est la rue festive du French Quarter (plutôt touristique, étudiante, pas forcément raffinée), Frenchmen en est le pendant local et Jazzy. Comme je le disais l’autre jour lors d’une visite guidée nocturne : « Le taux d’alcoolémie y est le même, mais la moyenne d’âge sur Frenchmen est de 10-15 ans plus vieille que sur Bourbon. »
La partie intéressante de la rue ne fait que 2 ou 3 blocs, mais dans chaque bar joue un groupe de musique et c’est ici que se trouve le Spotted Cat, réputé pour sa programmation. A l’angle de Frenchmen et Royal se trouve le fameux hôtel, et nous nous y sommes cette fois-ci arrêtés.
La dernière fois que Baptiste et moi étions allés à un tel concert, c’était pour écouter l’Orchestre National de Jazz à Strasbourg. Pour des novices comme nous, l’expérience de partitions contemporaines dissonantes avait été désagréable, à la limite du seuil de douleur. Dimanche dernier, Jason Brockamp et le New Orleans Wildlife Band nous ont réconcilié avec ce style de musique.
On a rapidement compris qui était Jason Brockamp, menant le groupe derrière sa contrebasse, mais en revanche impossible de savoir exactement la composition du Wildlife Band. Un geste de la main et une musicienne rejoint le groupe pour un solo à la flute traversière, avant de fendre à nouveau le public et de s’éclipser. Un peu plus tard un trompettiste vient lui aussi faire une impro, puis range son instrument et s’en va. Le groupe fait une pause et on comprend qu’une grande partie du public est constituée d’habitués, de petites amies ou de potes musiciens.
La musique reprend, un jeune homme au 1er rang se lève, cigare à la main, pour aller faire les chœurs quelques temps avant de briller à son tour et de nous faire la démonstration de ses capacités vocales. Le chanteur principal prend le contrôle, fait des signes aux musiciens, fait chanter le public, il a une voix et un charisme incroyable. On se demande s’il n’a pas passé ses dimanches de jeunesse à chanter à la messe.
De nouveau, quelqu’un se lève et rejoint le groupe. Cette fois-ci c’est pour un slam, et notre niveau d’anglais nous permet de comprendre qu’il improvise un ode à la musique et à la vie qui reprend. La nuit tombe, l’atmosphère est encore plus intime et chaleureuse, le public continue de faire les chœurs et on n’est plus bien sûr de savoir si on est dans la cour d’un hôtel ou à l’église.
Ce dont on est certains par contre est d’avoir assisté à un moment unique et d’avoir vu la musique s’inventer sous nos yeux, véritablement « en live ». C’est ça le jazz ?
Chaque fois que j’ai emménagé dans une nouvelle ville j’ai fait très attention à mes premières impressions et souvenirs, parce qu’il est amusant ensuite de voir comment certaines perceptions évoluent à mesure qu’on s’approprie un nouvel environnement.
De façon symétrique, j’ai aussi en mémoire une bibliothèque de lieux dont j’ai « figé » des souvenirs de « dernière fois » (quand j’ai quitté l’INSA ou CentraleSupélec, mes derniers moments dans les ateliers chez Arcelor, Jtekt ou Flender).
Quelques jours après être arrivé à NOLA je me suis rendu début Septembre à Lafayette Square pour y rencontrer les cyclistes du groupe Nola Fixed. Je me souviens avoir emprunté Simon Bolivar Ave, à moitié rassuré de traverser certains quartiers défavorisés et de devoir passer sous l’autoroute à la nuit tombante.
Quand le départ de la course d’orientation a été donné j’ai d’abord suivi les autres jusque Canal Street, un peu étourdi par les lumières des néons et le brouhaha des noctambules, puis me suis laissé distancer et ai finalement tourné à droite. Je me souviens avoir songé « Ça doit être ça, le French Quarter« , en remontant Burgundy St ou s’égrènent shotgun houses et des balcons de style espagnol.
Plusieurs checkpoints de la course d’orientation étaient sur St Claude, dont j’ai retenu facilement le nom qui me rappelle la chanson éponyme de Christine and the Queens. Au retour je me suis un peu perdu dans Marigny, curieux triangle aux rues défoncées dans un plan de ville sinon très parallèle et perpendiculaire (autant que le permet la topographie d’une ville au bord d’un méandre du Mississipi et dont elle tire le surnom de Crescent City – la ville croissant.)
J’emprunte maintenant quotidiennement l’underpass de Simon Bolivar où se réfugient nombre de sans-abris. Je travaille sur North Rampart St qui sépare le Quarter de Tremé, mon coiffeur est sur St Claude et j’ai acheté mes chaussures de vélo chez Bicycle Michael’s sur Frenchmen St. Les souvenirs s’accumulent ici et là, je ne suis plus vraiment un touriste, je vis et travaille ici. Je prends parfois une limonade ou un burger chez Betty’s, ou bien je pousse jusqu’au Rouses sur Royal Street, devant lequel chante parfois Alicia Renée reconnaissable de loin à sa voix et son chapeau, et de près à ses blue eyes incroyables.
(Le pianiste sur la vidéo est Jérémy, qui travaille aussi à Flambeaux Bicycle Tours et fait des visites guidées!)
Avant d’emménager ici je m’étais promené un peu sur Google Maps et avais été un peu surpris de l’état de délabrement de certains quartiers. J’avais espéré que les visuels ne soient pas à jour mais ce qu’on y voit est proche de la réalité : il y a beaucoup de nids de poule, de voitures ou de maisons dans un état préoccupant. D’un bloc à l’autre on peut passer d’un quartier pauvre à un autre huppé. La gentrification fait son œuvre si lentement qu’on se demande parfois si elle existe vraiment, quand dans un même bloc se côtoient terrains vagues, maisons en ruine et habitations neuves.
Pour vous donner un petit aperçu j’ai filmé un de mes trajets pour aller bosser (qualité de prise de vue et du montage : 1/5). Je varie parfois les itinéraires ; celui filmé passe par les quartiers populaires et en bordure du business district!
Depuis quelques jours j’essaie de déverrouiller mon téléphone en entrant le code de l’iPad de la boutique de location de vélo. Du côté de l’école dans laquelle je fais des remplacements, on m’a confié cette semaine un badge pour pointer mais je n’ai toujours pas été payé pour Avril. Deux salles, deux ambiances.
Aujourd’hui je me suis occupé de quelques vélos dont les protections de chaine vibrent. Après rapide enquête, je comprends que c’est parce que l’embout mobile de gauche se serre aussi progressivement que le boitier de pédalier se desserre à droite : tout l’ensemble se décale progressivement et le support du garde chaîne n’est plus maintenu.
Mes heures de lecture sur le site le plus moche mais le plus instructif du web (Sheldon Brown) ont été bien investies en 2012 quand j’ai converti un Motobécane pour en faire un pignon fixe : j’ai suffisamment de souvenirs quand aux standards de filetages italiens, français, suisse et britanniques pour comprendre comment une conception merdique est à l’origine de ce phénomène.
(Je sais, sans images c’est sans doute un peu abstrait.)
Au delà du plaisir de sortir un peu de la routine et d’utiliser un arracheur de manivelle et une douille cannelée (ça change de la clé de 15 et des clés Allen de 4, 5 ou 6), le réel bonheur de ces opérations est le moment du remontage et j’ai mis un petit moment à comprendre pourquoi graisser les taraudages du cadre ou l’axe de pédalier me donnaient le sourire.
Il y a sans doute une part de plaisir régressif (sexuel ?) d’étaler au doigt de la graisse (sans autre raison que parce que c’est le moyen le plus simple de procéder) mais je crois que cette opération me rappelle surtout les heures passées à assembler pièce à pièce mon vélo de polo ou de randonnée. La graisse verte est pleine de promesses : elle matérialise le soin apporté au montage ou à la réparation, le vélo qui sera bientôt en état de rouler. Elle est un message envoyé au futur à celui qui – peut-être – démontera ces pièces et se satisfera qu’elle les ait empêchées de se gripper.
A l’école aussi il y a des activité manuelle, mais moins gratifiantes. Alors que je suis content d’utiliser mes compétences autodidactes de mécanicien vélo pour 15$ de l’heure, j’ai eu du mal à me sentir bien employé vendredi quand j’ai passé 20min à tailler les 147 crayons de couleur d’une classe de maternelle. « C’est d’autant plus con que ça prive les marmot de l’occasion de pratiquer la motricité fine », a ajouté Baptiste.
Je m’étais promis de n’envoyer ma prochaine newsletter qu’une fois que j’aurai trouvé du boulot et que je ne bloguerai pas tant que je n’aurai pas fini le projet sur lequel je travaille pour obtenir mon certificat de web développeur.
Quelques avancées récentes (et les sollicitations des plus assidus d’entre vous) m’incitent à ré-ouvrir ces pages et à envisager de rattraper un peu de retard.
On ne va pas se mentir, après un début d’année intense et motivé, j’ai ensuite eu un passage à vide certain. Il suffit de jeter un coup d’œil à mes commit sur GitHub ou à mon historique Strava pour se rendre compte de l’impact de mon moral sur ma productivité et de celui de la météo sur ma mobilité :
Bien que n’ayant jamais vu plus que des extraits de Moonstruck, j’ai souvent eu en tête la voix de Cher, malheureusement sans l’effet escompté (peut être que l’élément clé est la double gifle ?).
« Un bridge job est exactement ce qu’il te faut. » m’a dit Christine – une amie de Rob en visite ce WE avec son mari – quand je lui ai expliqué que je venais de passer un entretien pour un job « qui me plait mais qui ne paie pas super bien ».
Réponse la semaine prochaine, il se pourrait que je commence lundi.
Après avoir suivi les émeutes en direct il y a 15 jours, c’est la cérémonie d’investiture que j’ai pu voir aujourd’hui sur NBC.
(Les Louisianais aiment détourner le son [o] en l’écrivant « eaux », et il est au début déconcertant de lire des drapeaux ou publicités encourageant l’équipe de football locale par des « Geaux Saints »… et puis on s’y fait!)