Ce dimanche, je retourne voir Australian Pink Floyd, groupe de reprises que j’ai déjà vu au Zénith de Nantes il y a un paquet d’années, et que j’ai hâte de revoir sur scène.
Leur parti pris est de chercher à reproduire à l’identique le son des Pink Floyd, et je me souviens que mon père avait été un peu déçu de la formule: ce n’était ni exactement pareil pour que l’illusion fonctionne, ni suffisamment différent pour que l’on apprécie une quelconque réinterprétation du répertoire.
Puisqu’il n’est pas possible de voir l’original, je suis de mon côté content de voir ce qui s’en rapproche le plus. J’écoute depuis des années en boucle « Pulse », incroyable live d’une tournée de 1994 en Europe. J’ai d’abord surtout écouté le 2nd CD, qui reprend « The Dark Side of the Moon », puis ai eu différentes chansons favorites au fil des années.
Il y a 10 ans j’étais hypnotisé par l’intro aux roto toms de « Times », j’aimerai trouver une façon visuelle permettant de représenter comment est construite la rythmique et la mélodie, je suis fasciné de la façon dont c’est à la fois cohérent et déconstruit, et comment tout se met peu à peu en place, un peu comme en musique électronique quand des samples viennent donner un par un des bribes de mélodie et de sons qui bientôt assemblés vont former un tout. (Version complète ici)
Plus récemment c’est « High Hopes » qui a attiré mon attention, par certains bouts de paroles que je comprends, mais surtout par sa mélancolie et pour l’incroyable solo de steel guitar. Bien sûr je recommande l’écoute des 5 minutes et 9 secondes qui mènent à ce « forever » et cette envolée mélodique, mais pour les pressés l’extrait suivant en est une reproduction quasi parfaite:
Cette semaine c’est Comfortably Numb que je redécouvre, doublement. D’abord la seconde moitié du morceau est occupée par une section de guitare incroyable, chargée d’une émotion qui me donne la chair de poule et fait naître une larme au coin de l’œil si je me laisse aller:
Je me suis aussi souvenu avoir découvert ce titre via les Scissor Sisters, et avoir à l’époque si peu aimé l’intro que je coupais la radio ou passait la chanson dès que je l’entendais. J’ai hier redonné une chance à cette reprise, et ai été très agréablement surpris de la fidélité à l’original dans une version si disco.
Je ne sais pas ce qui me touche particulièrement dans leur musique, je crois que je suis tombé dans leur univers via la bizarrerie de « Atom Heart Mother » – morceau découvert au collège en deux temps, parce que j’ai longtemps pensé que l’enregistrement se terminait à la 18ème minute avec l’envol de l’avion, avant de me rendre compte qu’il y avait encore 5min30 d’écoute pour parachever cette « suite ».
Je me suis rendu compte ces dernières années être plus à l’aise avec mes propres émotions, acceptant de me laisser aller devant un film, une série ou écoutant de la musique, laisser monter et apprécier ces vagues internes de plaisir, bonheur ou parfois frustration ou colère aussi, plutôt que de les réprimer par pudeur ou conformisme. Avant d’en arriver là, la bande des Pink Floyd avec leur claviers, chœurs, saxophones, roto toms, steel guitars et autres captation audio avaient manifestement déjà trouvé une façon de véhiculer des émotions à laquelle j’étais réceptif, même sobre.
Une citation attribuée à Eddie Van Halen (mais dont je n’ai pas retrouvé la source) résume mon appréciation pour Gilmour en particulier, mais s’applique à toute la musique du groupe:
« David Gilmour is the benchmark of less being more. He has proved that shredding and fast playing is not the benchmark of mastery level. Gilmour never wastes a note; he builds his solos like a painter; every note, every bend, every tonal inflection has merit…David’s solos paint a picture in the minds of his listeners. Something that really is a testament of his talent as a guitar player. »
C’est exactement ça: impossible pour moi d’écouter « shine on you crazy diamond » sans imaginer que les 2 minutes de synthétiseur planant puis la mélodie à la guitare puissent raconter autre chose qu’une rencontre avec un vaisseau extraterrestre.
Tentant d’écrire une nouvelle il y a quelques années, je faisais écouter l’intégralité de « The Dark Side of the Moon » au personnage principal, dans un moment de nostalgie lui rappelant l’écoute de ce vinyle chez ses parents, pendant qu’il prépare sa valise pour aller à Berlin régler une histoire personnelle lui tenant à cœur.
La puissance émotionnelle, planante et inspirante de cette musique me touche, et je ne lui en ai pas encore trouvé d’égal. J’espère que Mahler n’en prendra pas ombrage, mais je crois que c’est bien un album de Pink Floyd que j’emporterai sur une île déserte si on ne m’autorisait a en emporter qu’un.